Composé de femmes guerrières, le corps des Amazones aurait été créé par le roi Agadja (1708-1740). Son père, le roi Houégbadja, avait déjà créé un détachement de "chasseresses d'éléphants" qui faisait également fonction de gardes du corps. Mais Agadja en fit de vraies guerrières. "Elles sont là, 4000 guerrières, les 4000 vierges noires du Dahomey, gardes du corps du monarque, immobiles aussi sous leurs chemises de guerre, le fusil et le couteau au poing, prêtes à bondir sur un signal du maître.
Vieilles ou jeunes, laides ou jolies, elles sont merveilleuses à contempler. Aussi solidement musclées que les guerriers noirs, leur attitude est aussi disciplinée et aussi correcte, alignées, comme au cordeau".
D'après A. Djivo, dans Guézo, la rénovation du Dahomey, certaines femmes s'enrôlaient volontairement, d’autres, difficiles dans le ménage et dont les maris s'étaient plaints au roi, étaient enrôlées d’office. Le service militaire les disciplinait et la force de caractère qu’elles manifestaient dans la vie conjugale pouvait s'exprimer dans l’action militaire.
Sur les champs de bataille, elles protègaient le roi et prenaient activement part aux combats, sacrifiant leur vie au besoin. Guézo leur disait : "Quand vous allez en guerre, si vous êtes faites prisonnières, vous serez sacrifiées et vos corps deviendront de la nourriture pour les charognards et les hyènes."
Elles ne pouvaient ni se marier ni avoir d’enfants tant qu’elles étaient dans l’armée : elles étaient formées à la guerre et elles devaient en principe y consacrer leur vie.
"Nous sommes des hommes, non des femmes. Celles qui rentrent d’une guerre sans avoir conquis doivent mourir. Si nous battons en retraite, notre vie est à la merci du roi. Quelle que soit la ville à attaquer, nous devons la conquérir ou nous enterrer nous-mêmes dans ses ruines. Guézo est le roi des rois. Tant qu’il vivra nous ne craindrons rien".
"Guézo nous a donné à nouveau le jour. Nous sommes ses femmes, ses filles, ses guerrières. La guerre est notre passe-temps, elle habille, elle nourrit".
Cette armée aguerrie, souvent enivrée au gin, accoutumée à la souffrance et prête à tuer sans se soucier de sa propre vie, combattait avec vaillance, toujours à l'avant des troupes qu'elle excitait au combat.
En 1894, au début de la guerre entre les troupes du Général Dodds et celles du royaume d'Abomey, l'armée comptait environ 4000 amazones, réparties en trois brigades. "Elles sont armées de coupe-coupe à deux tranchants et de carabines Winchester. Ces amazones font des prodiges de valeur ; elles viennent se faire tuer à trente mètres de nos carrés..." (Capitaine Jouvelet, 1894).
Le corps des amazones sera dissout après la défaite du royaume d'Abomey, par le successeur de Gbêhanzin, Agoli Agbo.
De nos jours le nom « Dahomey » n’évoque peut être plus grand-chose. Il s’est pourtant produit des événements extraordinaires sur ce territoire connu aujourd’hui sous le nom de Bénin, et ce, depuis 1975.
Le Bénin se situe en Afrique de l’ouest entre le Togo, et le Nigéria.
Au 15ème siècle, les Portugais explorent le territoire. Petit à petit, le Dahomey devient célèbre pour sa traite négrière, surtout entre le 17ème et le 18ème siècle. Il sera connu sous le nom de « Côte des Esclaves ».
Alors que les Britanniques et les Français se battent pour contrôler la Boucle du Niger, les Français parviennent progressivement à imposer leur domination au Dahomey.
Au départ il s’agit d’un traité d’ « amitié et de commerce » en 1851. En 1861 ils obtiennent une autorisation pour que les missionnaires viennent s’y installer, en 1864 ils obtiennent le protectorat de la ville de Cotonou et sur le Royaume de Porto-Novo.
En 1892, la France décide d’attaquer le Dahomey en évoquant des prétextes tels que le cannibalisme, les sacrifices humains ou la polygamie pratiqués par la population autochtone. Il s’agit pour la France en réalité d’agrandir sa domination en Afrique Equatoriale Française (AEF) et d’atteindre également les possessions britanniques qui dominent le Nigéria.
Le Colonnel Dodds est à la tête de cette armée qui s’apprête à attaquer le Dahomey.
Son armée est composée de plus de 3000 hommes qui partent de la côte, de Cotonnou, et qui se dirigent vers Abomey, capitale du pays. Leur cible, le Roi Béhanzin qui dirige le Royaume du Dahomey.
Les populations locales qui ont pourtant affaire à une armée inattendue, ne vont pourtant pas se laisser faire.
En effet, même si leurs moyens sont très rudimentaires comparés aux armements des Français, ils tiendront tête à ces derniers et se montreront récalcitrants pendant au moins deux années.
La date du 26 octobre 1892 restera à jamais marquée dans la tête du Colonnel Dodds, qui parlera de la journée la plus « meurtrière » de cette guerre. En fait, alors qu’ils ne sont qu’à 50 kilomètres d’Abomey, les soldats français se retrouvent ce jour là confrontés à un phénomène étrange et auquel ils n'ont jusque là encore jamais eu affaire: devant eux, une armée immense leur bloque le passage. Cette armée est composée de femmes !Qui sont elles ?
Très vite, Dodds en est informé : ce sont les « Amazones » du Roi Béhanzin, des femmes guerrières connues pour se battre avec violence et énergie. Elles n’ont absolument pas peur de la mort, et tue ne leur fait pas froid aux yeux.
On les laisse combattre au devant de l’armée car elles sont sans pitié face à leurs ennemis et très résistantes au combat. Dodds avait lui même entendu parler de SEH-DONG-HONG-BEH, une femme au courage exceptionnel qui avait dirigé une amée de 6000 Amazones vers 1852. Pour Dodds, il y a donc de quoi sérieusement s’inquiéter.
Les Amazones du Dahomey sont minutieusement sélectionnées à l’adolescence, et toute leur vie elles s’exercent au métier des armes. Leur entraînement quotidien est très pénible : elles apprennent à manier les armes et sont conditionnées psychologiquement et religieusement à l’obéissance et à la vénération du Roi.
Elles sont vierges et doivent éliminer toute possibilité de fonder une famille, elles sont donc condamnées au célibat.
Une Amazone au repos
Mis à part les armes de combat, les Amazones sont armées d’amulettes destinées à les protéger contre les attaques de leurs ennemis et à faire fuir les mauvais esprits.
En 1990, le Roi Behanzin aurait négocié avec les Allemands en tronquant 400 esclaves contre 26 000 fusils, 6 canons, 4 mitrailleuses et des munitions. L’organisation de l’armée des amazones du Dahomey est répartie en 5 spécialités dont 3 infanteries :
- les fusillères qu’on appelle « les Gulonento »; elles portent une cartouchière à compartiments. Leur poudre est soigneusement conservée dans des feuilles de bananiers.
- le archères ou « les Gohento » (on en trouve de moins à moins depuis l’existence des armes à feu); elles restent néanmoins présentes et servent d’auxiliaires et de « porteuses » pendant les combats.
- les faucheuses appelées « les Nyekplohento » armées d’une énorme lame de 45 cm au bout d’un manche de 60 cm
- les artilleuses
- et l’Elite, les chassereuses qui sont sélectionnées pour leur force physique et leur stature. Elles sont très respectées. Normalement, elles ne participent que rarement au combat et seulement quand il s’agit d’un grand combat mettant le Roi Béhanzin lui-même en danger, ainsi que la nation.
Vous comprendrez donc que contre les Français, leur présence était de rigueur.
Dans un cas de force majeure comme celle-ci, les Amazones utilisent la technique dans laquelle elles excellent, la technique du corps à corps. Ainsi, tandis que les Français instaurent une certaine distance, elles cherchent à trouver le moyen de créer un affrontement physique. Elles vont pratiquer le « roulé-boulé » pour s’infiltrer en dessous des haies des baillonnettes des soldats français pour les piéger physiquement.
Les Français sont véritablement surpris par leur courage et et elles n’hésitent pas à brandir des têtes de leurs ennemis qu’elles ont sauvagement décapités pour les déstabiliser. Quand elles réussissent à les confronter physiquement, elles sont souvent gagnantes.
Toutefois, et malgré une résistance terrible, les Amazones ne peuvent plus faire face aux Français qui utilisent des équipements visiblement sophistiqués. Elles périssent de plus en plus, et alors qu’elles étaient au nombre de 1200, elle ne sont plus qu’une centaine à combattre l'armée française qui a elle aussi diminué en nombre.
Elles n’ont plus assez d’espoir, mais elles refusent de lâcher prise. Certaines manifestent leur colère et leur haine aux Français en se coupant un sein et en frappant violemment à mort ceux qu’ils arrivent à attraper. Au final, en novembre 1892, lorsque les Français parviennent à la capitale, elles ne sont plus qu’une cinquantaine.
C’est la chute du Royaume Dahomey et la fin de celles du corps d’armée des Amazones.
Source : www.estis.net